Les mobiles

Paris, 1870, départ de la garde nationale mobile pour Strasbourg (source gallica.bnf.fr / BnF)

Sous le second Empire, le fonctionnement de l'armée reposait sur la conscription. Le Service militaire s'effectuait selon un tirage au sort. Ceux qui avaient tiré les « mauvais numéros » étaient incorporés dans l'armée active. Les conscrits faisaient 7 ans de service. Ceux qui avaient tiré les bons numéros, allaient rejoindre la garde mobile.

Les jeunes hommes qui se trouvaient basculés dans le camp de cette dernière effectuaient cinq ans. Étaient ainsi mises sur pied des unités d'infanterie et d'artillerie correspondant aux circonscriptions de l'administration civile. Chaque ville, d'une certaine importance, avait ses mobiles.

Les mobiles étaient équipés par les autorités civiles. Pour les uniformes, par exemple, la ville fournissait le drap et chacun devait passer chez le tailleur local. Ceci explique la grande disparité de tenues observée alors entre mobiles, selon leur ville ou département d’origine. Administrativement, l'ensemble des gardes mobiles était regroupé en unités départementales (exemple : mobiles du Doubs, de la Haute-Saône, des Vosges, de Saône-et-Loire, etc.).

L'ensemble de la garde mobile, au niveau national, formait une masse de réserve d'environ 600000 hommes.

En théorie, celle-ci devait permettre au gouvernement en cas de guerre de multiplier par deux les effectifs de l’armée.

Mais l'application pratique de ce principe se révélait difficile, en raison en particulier de la nécessité de fournir régulièrement une formation militaire à toutes ces formations civiles.

Lorsque la guerre franco-prussienne éclata en juillet 1870, la garde mobile étaient médiocrement armée et entraînée. Les unités manquaient souvent de cohésion et d'instruction ; elles étaient encadrées et disciplinées d'une façon très variable mais presque toujours insuffisante.

Belfort ne faisait pas exception. A l’approche du siège, les quelques bataillons de mobiles qui se trouvaient dans la place n'étaient ni armés ni équipés. Le général de Chargère, qui commandait alors, s'empressa de faire donner des armes à ces soldats qui, la veille encore, étaient dans leurs foyers.

Ils n'avaient pas l'instruction militaire suffisante et qui plus est n'étaient pas commandés par des chefs ayant l'expérience et l'autorité nécessaires.

Le Monde illustré, 1870, mobiles dans une casemate durant le siège de Paris, gravure de presse (source gallica.bnf.fr / BnF)

Malgré leur engagement, les compagnies de mobiles n’obtinrent dès lors pas toujours, lors de leurs sorties ou missions, les résultats qu'on en attendait. La place n’eut toutefois jamais tenu 103 jours sans la présence et le courage des mobiles.

Pendant le siège, la garnison comprenait 12 800 mobiles, représentant les trois quarts de l'effectif total de la garnison. Les mobiles y ont monté la garde, servi les canons, remué la terre et manié la pelle sur les remparts de la Citadelle, de la Miotte, de la Justice, des Perches… Ils ont assuré la défense de la place et disputé à l'ennemi les monts, bois et villages environnants.

E. Schweitzer, illustrateur, L'infanterie de la garde nationale mobile pendant le siège de Strasbourg, fin XIXe (source gallica.bnf.fr / BnF)

Les mobiles payèrent à Belfort un lourd tribut durant les 103 jours de siège, avec près de 2000 décès dénombrés dans leurs rangs. Enterrés pour beaucoup d’entre eux au Pré Gaspard, sur les pentes du fort de la Justice, comme une majorité des victimes civiles et militaires du siège, les mobiles donneront en 1873 leur nom au cimetière où ils reposent nombreux, qui porte depuis lors le nom de cimetière des mobiles.

Les formations de mobiles disparurent après le conflit franco-prussien pour faire place à des unités composées de réservistes, formés et encadrés par le Service des Armées.

Photo page précédente : Frédéric Regamey, mobiles au siège de Strasbourg, chromolithographie, 1911 (source gallica.bnf.fr / BnF)