La défense de Belfort

La place de Belfort en 1870 (source gallica.bnf.fr / BnF)

En 1870, Belfort est déjà un ensemble fortifié de premier ordre. Cette place forte se situe dans la vallée de la Savoureuse, rivière qui coule du nord au sud et sépare la cité intra-muros et ses faubourgs. A partir de 1818 et jusqu’à la fin de la guerre de 1870, la défense de Belfort connaît une remarquable extension en direction des collines qui dominent la ville et la Citadelle. Cet ensemble fortifié permet de contrôler tous les accès à la cité.

A l’arrivée de l’armée prussienne, Belfort comprend ainsi plusieurs positions fortifiées. La ville est défendue par : - Au nord et à l’est : la Justice et la Miotte, deux forts construits sur le roc et qui délimitent le vaste camp retranché du Vallon ; - A l'ouest : les forts des Barres et de Bellevue ; - Au sud et au sud-est : les Hautes et Basses-Perches ; - Enfin, au centre, la Citadelle dominant toutes les autres positions, présentant du côté de la ville ses flancs taillés verticalement dans un roc impénétrable.

Au centre du dispositif, la Citadelle constitue l’ultime défense et l’élément primordial pour les défenseurs.

La Citadelle est protégée par un important dispositif de fortifications et fossés, créé par Vauban au XVIIe siècle, conforté par les travaux conduits par le général et ingénieur militaire Haxo au début du XIXe siècle.

Coupe à travers la Citadelle et ses fortifications, extrait d'un cours de fortification, fin XIXe (source gallica.bnf.fr / BnF)

La garnison de Belfort est composée d’environ 17000 hommes dont 360 officiers.

En temps de paix, la garnison est logée dans les casernes occupant le pourtour de la ville, à l'intérieur des remparts, et dans d’autres situées dans les faubourgs. Aucun de ces bâtiments n’est véritablement à l'épreuve des bombardements. Il existe heureusement sur la place de nombreux abris robustes, en plus des casernes voûtées des forts. On les trouve par exemple dans les tours et les casemates des remparts. La Citadelle, surtout, est bien pourvue en abris et contient, dans sa troisième enceinte, l'un des plus vastes, creusé dans le roc et connu sous le nom de Grand-Souterrain.

Le 19 octobre 1870, le commandement de la place de Belfort est confié au lieutenant-colonel Denfert-Rochereau, qui est en même temps nommé colonel.

Le fort des Barres n'est pas encore complètement achevé. Le fort de Bellevue et les deux forts des Hautes et Basses-Perches ont été eux élevés à la hâte depuis la déclaration de guerre. Le colonel Denfert-Rochereau entreprend immédiatement d’importants travaux de consolidation des forts inachevés.

Tous les forts sont néanmoins correctement armés, et pourvus de vivres et de munitions. De bons magasins à poudre et des abris à munitions existent à peu près partout où ils sont nécessaires.

A l’approche des troupes prussiennes de Belfort début novembre 1870, le colonel Denfert-Rochereau, rompant avec ses prédécesseurs, opte pour une stratégie de défense active. Il est convaincu qu’il faut tout faire pour empêcher l’ennemi de prendre position et d’établir puis resserrer tranquillement son cordon. Il envoie donc des bataillons au contact direct de l’assaillant, avec l’appui des canons de la place. L’objectif est de placer constamment l’ennemi sur la défensive et de l’obliger à reculer après chaque avancée ; ceci a minima pour gagner du temps.

Cette stratégie offensive réussit à repousser d’un mois l’investissement total des environs de la place par les troupes prussiennes. Une fois celles-ci installées autour de Belfort à distance de canon, ce qui se produit fin novembre 1870, le bombardement de la ville devient inévitable. Celui-ci débute le 3 décembre.

Les troupes françaises tiennent alors encore plusieurs villages clés pour la défense de la place, notamment Danjoutin et Pérouse, deux villages particulièrement importants pour éviter la prise par les Prussiens de la colline des Perches, principale voie d’accès possible à la Citadelle.

Danjoutin est néanmoins pris le 8 janvier 1871, puis Pérouse le 21 janvier.

Les 26 et 27 janvier 1871, deux jours avant la capitulation de Paris, pressés d'en finir avant que la France ne soit contrainte à l’armistice, les Prussiens se lancent dans une attaque mal préparée des Perches, qui leur coûte plus de 500 hommes.

Ils reprennent quelques jours plus tard l’assaut des Perches.

En manque de projectiles et mal protégés par un ouvrage fragilisé, les soldats de la place n’ont d’autre choix que d’abandonner les Basses-Perches à l’assaillant, qui y entre le 8 février 1871.

La prise des Perches par les Prussiens leur ouvre la voie à la Citadelle.

L'ordre du gouvernement français du 16 février 1871 au colonel Denfert-Rochereau de rendre la place fige la situation.

La place de Belfort est ainsi toujours debout après cent trois jours de siège, dont soixante-treize d'un bombardement sans trêve. La garnison, en proie à ce feu ainsi qu’aux épidémies et à 3 mois d’un froid terrible, est diminuée du quart de son effectif.

La garnison quittant Belfort, carte postale ancienne

Les quelques 12000 soldats français survivants quittent Belfort les 17 et 18 février 1871 par la porte de France, sous les yeux des habitants de la ville venus dire adieu à ceux qui les ont si courageusement défendus.