Edouard Mény

Gustave Dauphin, Edouard Meny, huile sur toile, 1855 ©Musée(s) de Belfort

Notaire de profession, à la tête d’une étude prospère, Edouard Mény entre au conseil municipal de Belfort en 1846 et devient maire en 1855. Il s’illustre cette même année par son courage et son dévouement lors de l’épidémie de choléra qui frappe la ville. On sait également le courage dont il a fait preuve en sauvant un enfant de la noyade sous la glace de l’étang de la Miotte.

Lorsque débute la guerre franco-prussienne de 1870. Edouard Mény a 52 ans et déjà 15 années d’expérience en tant que maire. Il est un maire connu de tous et respecté. Le siège de 1870-1871 va lui fournir une nouvelle occasion de démontrer ses qualités d’organisation, de courage et de cœur.

Edouard Mény met à profit le temps dont il dispose avant l’arrivée des Prussiens pour faire évacuer les orphelins. Il assure l’approvisionnement de la ville en vivres en vue d’un siège long. Il fait remettre en état les puits et fontaines de la ville pour prévenir une éventuelle coupure de l’alimentation principale de la ville. Il fait construire des abris dans les rues pour protéger les habitants surpris par un bombardement lors de leurs déplacements. Il assure l’organisation du service sanitaire, mettant en place, à l’Hôpital et dans les différentes Ambulances de la ville, les lits demandés par l’autorité militaire.

Il fait aménager les caves de l’Hôtel de ville et de l’église Saint-Christophe pour y accueillir les habitants dont les maisons sont dépourvues de caves voûtées.

Il organise la mise en place d’un service de guetteurs d'incendie. Il ordonne que des approvisionnements d'eau soient placés dans les greniers et aux différents étages de chaque maison. Il règle la répartition des pompes à incendie et des postes de pompiers dans les différents quartiers de la ville et des faubourgs. Grâce aux veilleurs, aux pompiers, aux provisions d'eau établies partout, les premiers secours se trouvaient toujours sur les lieux, et ceci empêcha bien des incendies de se développer.

Durant les 103 jours du siège, Edouard Mény montre une attention constante à la population. Il visite les habitants dans les caves, rend visite aux blessés et familles endeuillées. On le voit partout où il y a un devoir à remplir, donnant à tout le monde l’exemple de la bravoure, du dévouement et de la générosité.

Edouard Mény, photographie de Joseph Vernier, carte de visite (source gallica.bnf.fr / BnF)

Le colonel Denfert Rochereau, au terme du siège, tient à saluer le rôle admirable tenu par Edouard Mény durant cette période douloureuse. Il lui écrit la lettre suivante :

« Belfort, le 16 février 1871. Au moment de quitter la place de Belfort, je tiens à vous témoigner toutes les satisfactions que j'ai éprouvées de votre admirable conduite pendant le siège. Vous vous êtes montré véritablement Maire, donnant à tous l'exemple du dévouement, visitant les populations dans les caves ; veillant à ses besoins, et faisant tout ce qui était en votre pouvoir pour alléger les souffrances de chacun. Vous avez su, en outre, assurer la marche régulière des services civils, comme en temps ordinaire. Je ferai tout ce qui sera en mon pouvoir pour que vous receviez du Gouvernement la légitime récompense que vous méritez. En attendant, vous avez la reconnaissance de vos concitoyens et de la garnison qui vous assurera une page glorieuse dans l'histoire du siège. Recevez, Monsieur le Maire, l'assurance de ma considération très distinguée. »

Edouard Mény tient de son côté quelques mois plus tard, dans son livre « Le siège de Belfort, 1870-1871 », à rendre hommage à l’ensemble des Belfortains :

« Il est de notre devoir de proclamer hautement, pour le présent et l'avenir, que les habitants de notre cité héroïque, malgré toutes les souffrances qu'ils ont eu à endurer, et les pertes douloureuses de toute nature qu'ils ont éprouvées, ont supporté ce siège avec un courage et une abnégation qui ne se sont jamais démentis. Jamais aucun d'eux n'a fait entendre une parole de désespoir ou de défaillance, et n'a cherché à exercer la moindre pression sur les résolutions de l'autorité militaire. Si beaucoup d'entre eux ont eu leurs familles décimées ; s'ils ont vu leurs intérêts les plus chers à jamais compromis ; s'ils ont perdu une partie de leur bien et de leur fortune, tous peuvent dire avec orgueil qu'ils ont sauvé ce qu'ils avaient de plus précieux : leur honneur et leur nationalité. Ils ont été dignes enfin d'être conservés à notre malheureuse France. »

Edouard Mény reste maire jusqu’en 1872. Retiré ensuite chez son fils à Sèvres, il est renversé par un omnibus en janvier 1891 et meurt à Paris le 22 février des suites de l’accident. Inhumé d’abord au Père Lachaise, son corps est transféré le 5 avril à Belfort, au cimetière de Brasse comme il l’avait souhaité. Pour rendre hommage à ce maire qui lui a tant donné, la ville de Belfort décide à sa mort d’attribuer son nom à la rue qui longe sa maison place d’Armes.