Aristide Denfert-Rochereau (1823-1878)

Frédéric Regamey, Le colonel Denfert-Rochereau au fort de la Miotte, chromolithographie, collection privée

Le colonel Denfert-Rochereau se distingue lors de l'« expédition de Rome » de 1849 et participe ensuite à la guerre de Crimée en 1855 où il gagne ses galons de capitaine. En poste en Algérie de 1860 à 1863 en tant qu’officier-architecte, il est chargé de superviser de nombreux chantiers de construction. Profondément républicain, Denfert-Rochereau est nommé à Belfort en 1864 au commandement du génie.

Il entreprend alors d’améliorer la défense de la place et fait construire en particulier le fort des Barres (Fort Hatry) ainsi que des redoutes sur le plateau de Bellevue (à l’actuel emplacement du cimetière). Il obtient également le renforcement des redoutes en terre aménagées aux Perches par le général Lecourbe lors du siège de 1815.

Il a compris que les Basses et Hautes-Perches sont le point faible de la place car elles dominent la citadelle dont elles ne sont éloignées que de 900 m. Denfert-Rochereau a compris la nécessité de tenir coûte que coûte ce site stratégique lors d’un éventuel siège (« qui tient les Perches tient Belfort ») et a recommandé sa fortification.

Lorsqu’éclate la guerre de 1870, Denfert-Rochereau, lieutenant-colonel depuis le 10 octobre, est nommé par Léon Gambetta, ministre de la Guerre et de l'Intérieur, colonel à titre provisoire et gouverneur de Belfort.

Denfert-Rochereau, conscient que cette garnison hétérogène est mal équipée et insuffisamment pourvue en artillerie, met tout en œuvre pour en faire une troupe disciplinée et apte au combat.

Il hâte les travaux de fortifications à Bellevue, aux Perches, à Danjoutin et à Pérouse. Dans l’esprit de la tactique adoptée par Lecourbe en 1815 : tenir à distance les assiégeants, il fait occuper les villages environnants. Pendant plus d’un mois, s'appuyant sur une stratégie de défense en profondeur inédite, la garnison de Belfort effectue de nombreuses sorties, soutenue par son artillerie à longue portée.

Au milieu de la place assiégée et bombardée de toutes parts, Denfert-Rochereau, dans son poste de commandement de la casemate 22, mène, avec sa garnison de 17000 hommes et la population de la ville, une farouche résistance de cent trois jours, contre près de 40 000 soldats prussiens, causant à l’ennemi de très importantes pertes. Au général Von Tresckow qui lui demande de capituler, il répond cette phrase devenue célèbre : "... nous connaissons l'étendue de nos devoirs envers la France et envers la République et nous sommes décidés à les remplir ".

Extrait de fin de la réponse de Denfert-Rochereau à la lettre du colonel von Tresckow du 4 novembre 1870 demandant à Denfert de lui livrer la place (source gallica.bnf.fr / BnF)

Le 28 janvier 1871, l’armistice franco-prussien est signé mais exclut Belfort qui résiste toujours vaillamment. La garnison ne cesse le feu que le 13 février, sur ordre du gouvernement présidé par Adolphe Thiers. Le 18 février, Denfert-Rochereau quitte Belfort avec ses troupes et leurs armes. Denfert-Rochereau, ne s'estimant pas vaincu, refuse les honneurs de la guerre obtenus à sa demande pour ses hommes.

Mal récompensé, Denfert-Rochereau est placé dès 1871 en non-activité puis en disponibilité. Critiqué pour son attitude lors du siège, ses opinions politiques déplaisant à une partie de l’état-major de l'Armée, Denfert-Rochereau n’obtiendra jamais le grade de général.

Il se lance alors dans la vie politique. Il est élu député en 1871 dans plusieurs départements mais battu à Belfort. Dans la ville, d’aucuns lui reprochent les souffrances endurées et les ruines accumulées. Nonobstant, la ville de Belfort lui rendra hommage avec la statue "Quand-même" ainsi qu’avec le monument des trois sièges.

Timbre du centenaire du siège, 1970, droits réservés

Le colonel Denfert-Rochereau meurt en mai 1878, d’une mauvaise bronchite à l’âge de 55 ans. Ses obsèques ont lieu à Montbéliard, ville natale de son épouse.

Il reste très présent dans la mémoire collective de la France. La place parisienne où se trouve la réplique en bronze du Lion de Belfort, mais également le rond-point de l'entrée de l'Ecole Polytechnique de Palaiseau, fleuron des Grandes Ecoles françaises, portent encore aujoud'hui son nom.

Image page précédente : source gallica.bnf.fr / BNU de Strasbourg